Par un communiqué de presse du 14 mai 2019, le groupe Gfi Informatique publie ses résultats annuels 2018. Comme chaque année, nous sommes ensevelis sous un déluge de chiffres flatteurs au service d’une dialectique parfaitement huilée et d’un discours savamment formaté !
Avec un chiffre d’affaires en hausse de 23% (dont 7,4% en organique s’il vous plait !), un résultat opérationnel en hausse 21% et un résultat net retraité en hausse de 16%, les esprits chagrins seraient bien malvenus d’oser se manifester !
Néanmoins, pour qui voudrait porter un regard un peu objectif sur ces chiffres, ce bel enthousiasme mérite d’être un peu tempéré. Que dire de la marge opérationnelle, qui perd 0,2 point à 5,9% et s’éloigne des objectifs ambitieux du fameux plan BOOST 2020 (8% en 2020) ? Que dire du résultat net (39,8 M€) toujours en-deçà des projections envisagées lors de la conclusion du pacte d’actionnaires en 2016 (1) ?
Enfin, l’indicateur qui vient surpasser tous les autres en termes de croissance reste le gearing (2) !! Celui-ci pulvérise tous les records en passant de 42% à 98% ! Conséquence directe du rachat de Realdolmen l’an dernier, l’endettement du groupe s’est envolé (3). Si aujourd’hui notre actionnaire peut goûter en toute quiétude aux délices de l’effet de levier, qu’en sera-t-il à l’heure de la remontée des taux d’intérêts ? Ne perdons pas de vue qu’en ces temps économiquement troublés, une simple intonation de voix d’un banquier central peut suffire à déclencher un krach obligataire… Et si l’on ajoute la forte volatilité des actifs dans le secteur des ESN à l’incertitude sur les taux d’intérêts, le réveil pourrait être difficile…
La CFTC pointe du doigt les risques inhérents à cette forte montée de l’endettement, risques amplifiés par la présence d’un actionnaire unique au capital.
Mais y-a-t-il quelqu’un chez Gfi pour se préoccuper véritablement de la pérennité du groupe à long terme ? Y-a-t-il quelqu’un pour regarder au-delà du bilan 2019 ? Et surtout, y-a-t-il quelqu’un pour se préoccuper du devenir des salariés ?
(1) Pour rappel, au titre du Pacte d’Actionnaires conclu en 2016, une promesse d’achat avait été consentie par Mannai à Apax et Boussard & Gavaudan sur 20% du capital de GFI, exerçable en 2018 au prix de 8,50 euros par Action sous réserve de la réalisation par GFI d’un résultat net consolidé de 42 M€ pour l’exercice 2017.
(2) Le gearing correspond au ratio endettement net sur capitaux propres. Une entreprise faiblement endettée affiche un gearing proche de 0%. Au contraire, un gearing élevé est synonyme de fort endettement.
(3) Cf. notre bulletin de septembre 2018, page 2 : « Le casse-tête du financement »